Le long du littoral, les paysages que nous observons ne représentent que la partie visible du littoral. Sous cette enveloppe se cache un univers peu connu, riche d’informations, qui renferme une partie de l’histoire du littoral, de son édification et de ses évolutions au cours du temps.

Parmi différentes techniques de suivi, les investigations par géophysique appliquée s’avèrent très pertinentes pour l’étude des littoraux. L’usage du géoradar permet ainsi l’investigation de systèmes tels que les dunes de Nouvelle-Aquitaine ou de Vendée, l’isthme de Saint-Pierre-et-Miquelon, les lidos catalans, ou encore les cheniers de Cayenne (cordons sableux sur un substrat vaseux).

Chaque dune, chaque « géosystème dunaire » est différent. Et l’environnement qui a conduit à leur édification et ce sur quoi les dunes reposent diffèrent eux aussi d’un site à l’autre : un ancien marais, une embouchure aujourd’hui comblée, etc. La gestion actuelle et future de chaque site dépend de toutes ses spécificités.

Qu’est-ce que le géoradar ?

Le géoradar (ou GPR pour ground penetrating radar) est une méthode géophysique non-intrusive et non-destructive dont le fonctionnement repose sur l’émission, la propagation et la réflexion d’ondes électromagnétiques hautes fréquences (centaines de MHz) dans le sol. Le signal reçu permet d’imager rapidement et de façon continue l’architecture interne des structures sédimentaires (i.e. différentes unités, pendages, épaisseurs des dépôts…). Pour des conditions optimales, cet outil permet d’imager jusqu’à environ 20 m d’épaisseur (pour une antenne de 100 MHz). Les délimitations (appelées « réflecteurs ») qui sont mises en évidence entre les unités sédimentaires sont les témoins d’une géomorphologie héritée, la présence de paléosol ou le toit de la nappe d’eau. Ils peuvent également être assimilés à des lignes temps, c’est-à-dire à des marqueurs de la morphologie dunaire à un temps donné.

Quelles informations se cachent sous les dunes ?

L’histoire d’un massif dunaire est conservée et identifiable au sein de son architecture interne (voir l’article dédié dans le cadre du projet SIBLES). Cela fournit des éléments de compréhension du contexte et de l’histoire de mise en place de ces systèmes littoraux jusqu’à leur forme actuelle. On peut ainsi mettre en évidence :

• les liens avec leurs soubassements, ce sur quoi elles reposent comme par exemple des paléosols ou des dépôts d’avant-côte,
• les différentes phases de son évolution comme des phases de migration, des encoches d’érosion et la résilience des systèmes (voir l’article dédié)
• les actions de gestion au cours de 2 derniers siècles, comme les localisations précises des palissades implantées par les Eaux et Forêt au début du 19e siècle qui ont servi de noyau aux dunes bordières aquitaines, ainsi que les marques des actions de gestion sur les sites (reprofilages massifs, implantation de piquets….).

Le couplage des données historiques de gestion, de la géomorphologie avec la géophysique, voire l’hydrogéologie sont étroitement complémentaires et mettent en lumière l’évolution du système littoral. La mobilité dunaire, parfois extrêmement rapide (comme l’exemple illustré ci-dessous) offre une nouvelle perspective. Le croisement de suivis topo-géomorphologiques (levés Lidar topographiques, aéroportés, profils au GPS différentiel) réalisés par des observatoires côtiers, avec l’imagerie géoradar, permet de dater et contextualiser les évolutions d’un site d’étude et de son trait de côte.

L’interprétation des données permet également de calculer des volumes sédimentaires réalistes de ces édifices dunaires, en fonction de ses différents compartiments et/ou phases de gestion et surtout en fonction des marqueurs de son soubassement.

Dans une optique de résilience des littoraux face aux changements climatiques, à la hausse du niveau de la mer ou à l’érosion du littoral, ces approches novatrices sont essentielles pour comprendre les mécanismes de construction et de mobilité des dunes mais également pour connaitre leurs contraintes (paléosol, limite des stocks sédimentaires, influence de l’hydrogéologie…). Une compréhension intégratrice et complète des sites reste indispensable pour proposer des modèles et scénarios réalistes d’évolution future des littoraux.

Les structures et observatoires mobilisés

Bibliographie complémentaire

• Billy, J., Baudouin, V., Portal, A., Deparis, J., Bitri, A., Garcin, M., 2020. An Innovative Approach for a Comprehensive Characterization of Coastal Dune Systems through Internal Architecture and the Associated Intrinsic Geophysical Properties. J. Coast. Res. 95, 387–391. https://doi.org/10.2112/SI95-075.1
• Robin, N., Billy, J., Castelle, B., Hesp, P., Laporte-fauret, Q., Nicolae, A., Marieu, V., Rosebery, D., Bujan, S., Destribats, B., 2020. Beach-dune Recovery from the Extreme 2013-2014 storms erosion at Truc Vert Beach , Southwest France  : New Insights from Ground- Penetrating Radar. J. Coast. Res. SI95. https://doi.org/10.2112/SI95-115.1
• Robin, N., Billy, J., Castelle, B., Hesp, P., Nicolae Lerma, A., Laporte-Fauret, Q., Marieu, V., Rosebery, D., Bujan, S., Destribats, B., Michalet, R., 2021. 150 years of foredune initiation and evolution driven by human and natural processes. Geomorphology 374, 107516. https://doi.org/10.1016/j.geomorph.2020.107516
• Robin, N., Billy, J., Nicolae Lerma, A., Castelle, B., Hesp, P.A., Rosebery, D., Fauny, C., Deparis, J., Marieu, V., Bouchet, C., Miot da Silva, G., 2023. Natural remobilization and historical evolution of a modern coastal transgressive dunefield. Earth Surf. Process. Landforms 1–20. https://doi.org/10.1002/esp.5535

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